POUR UN SOLDAT CITOYEN

L'Afghanistan expliqué aux soldats et à leurs familles

vendredi 30 décembre 2011

Qu’est-ce qu’un porte-parole des Talibans pour la presse ?


Deux légionnaires français ont été tués hier 29 décembre par un membre de l’armée afghane. La presse annonce que cette attaque a été revendiquée par les Talibans en citant le message d’un de leurs « porte-parole » (1).
Les lecteurs de ce blog se souviendront des fameux sites Web pro-taliban dans lesquels un certain Zabihullah Mujahid annonce chaque jour des dizaines de morts et de multiples actes de bravoure des talibans dans un langage agrémenté de nombreux épithètes de style « lâches envahisseurs » ou « marionnettes terroristes afghanes ».
Or, les sources citées par la presse ne sont rien d’autre que ces sites Web pro-taliban. Il est donc difficile de leur accorder un quelconque crédit. Il suffit d’y jeter un œil pour s’en rendre compte (2).

Figure : copie d’écran de site Web pro-taliban

(1) http://www.20minutes.fr/monde/afghanistan/849629-afghanistan-talibans-revendiquent-attaque-mortelle-contre-deux-legionnaires-francais
http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2011/12/29/deux-soldats-francais-de-l-isaf-tues-par-un-homme-en-uniform.html

(2)http://theunjustmedia.com
http://pakistancyberforce.blogspot.com/2011/12/288-usz-led-terrorist-invaders-92.html
http://shahamat-english.com
http://www.liveleak.com/view?i=d10_1325245784

samedi 17 décembre 2011

Un reportage photo sur la Kapisa


Le photographe Jean-Christophe Hanché a passé sept semaines aux cotés des soldats français dans la province de Kapisa. Il publie un livre intitulé « Kapisa Afghanistan » qui réunit 300 photographies illustrant la vie quotidienne de ces jeunes soldats.

La Kapisa est une des zones les plus sensibles du conflit afghan. L’armée française y est déployée depuis 2009 et 34 soldats français y ont été tués. « Kapisa Afghanistan » est à ce jour le seul livre en français dont le titre contient le mot Kapisa.

Vous pouvez commander cet ouvrage à l’adresse suivante : http://www.kapisa-afghanistan.com

samedi 26 novembre 2011

Faits divers, faits de société

Tout fait divers est aujourd’hui transformé en fait de société. Derrière chaque crime sadique ou suicide au travail, on trouve une structure dont on veut démontrer l’existence : décadence de la société, abus du management…
A l’inverse, la mort d’un soldat au combat, qui est bien le résultat d’un acte décidé par la société, se retrouve dans la rubrique fait divers.

mardi 1 novembre 2011

Sur le livre d’Anne Nivat « Les Brouillards de la guerre »*

Ceux qui suivent ce blog et s’intéressent aux mêmes aspects du conflit afghan que moi trouveront dans ce livre des informations de terrain sur ce que pensent les militaires de la guerre et de la façon dont elle est conduite. Moins courant, Anne Nivat nous montre aussi le point de vue peu enthousiaste des afghans, dont les cœurs et les esprits ne semblent pas avoir été gagnés. Un nouveau soutien pour l’opinion de plus en plus répandue selon laquelle cette guerre ne marche pas.

Un point particulièrement frappant, à mon avis, c’est ce chiffre donné par un ex-directeur de la CIA : il n’y aurait en Afghanistan qu’entre soixante et cent membres d’Al-Qaïda. Je rejoins entièrement l’auteure lorsque qu’elle conclue : « n’aurait-il pas été plus approprié de mener une politique de contre-terrorisme, comme en Somalie ou au Yémen, plutôt qu’un tel gigantesque effort de contre-insurrection ? »

*Fayard, octobre 2011

lundi 29 août 2011

Développement de la contre-insurrection : interdiction de flatuler bruyamment en public

En Afghanistan, la contre-insurrection tente de « conquérir les cœurs et les esprits » afin de minimiser l'appui apporté par la population aux insurgés. L'armée s’implique dans l’aide aux populations, distribue des pamphlets « éducatifs », organise des chouras(assemblée de notables).

Ce n’est un secret pour personne, cette doctrine est un échec : les occidentaux n’ont pas gagné la sympathie des afghans et l’activité des talibans s’est aujourd’hui renforcée.

Qu’à cela ne tienne. L’armée américaine raffine sa doctrine de la contre insurrection en interdisant aux soldats de flatuler de manière bruyante en présence des afghans, un acte mal vu dans cette culture différente.

Mais flatuler bruyamment étant un des passe-temps favoris des Marines, son interdiction pourrait avoir des conséquences stratégiques inverses, à savoir, une baisse du moral des troupes.

dimanche 12 juin 2011

Création de l’association Militaires et Citoyens

Nous annonçons la création de l’association Militaires et Citoyens (M&C) dont les statuts ont été déposés en sous préfecture de Brest.

M&C a pour objet principal l’étude et l’analyse des conditions de vie des militaires et l’information du public sur ce sujet. Elle s’intéressera particulièrement aux questions matérielles, professionnelles et morales de la vie collective ou individuelle des militaires, de leurs familles et de leurs ayants droit et ayant cause.

Les premières actions menées par M&C consisteront à sensibiliser l’opinion et le législateur à la difficulté pour les militaires d’accéder aux droits et libertés fondamentales du citoyen. Dans ce but, le président de l’association rencontrera en ce mois de juin les députés Gilbert Le Bris et Étienne Mourut, de la commission Défense de l’Assemblée Nationale, et communiquera sur ces questions auprès du grand public durant la campagne présidentielle 2012.

M&C proposera, via un site internet et via son forum comptant plus de 3 000 membres, des actions ponctuelles et des informations pertinentes sur ses activités.

Les cinq fondateurs de l’association sont : un ancien marin d’État, une chef d’entreprise mère de soldat, une civile de la Défense, une enseignante fille de fonctionnaire de la police Nationale et un retraité de la Gendarmerie.

M&C a scellé un partenariat avec l’Adefdromil (Association de défense des droits des militaires) afin de générer une synergie autour des questions communes aux deux associations.

M&C est une association loi 1901 et non une association professionnelle.

vendredi 29 avril 2011

Doit-on faire l’éloge des batailles de Camerone et Sidi Brahim ?

L’anniversaire des combats de Camerone et de Sidi Brahim sont devenus respectivement la fête traditionnelle des légionnaires et des chasseurs alpins. Ces combats ont en commun le fait d’avoir opposé un petit nombre de français à un ennemi en surnombre dans un combat perdu d'avance et sans conséquence stratégique.

En 1863, au Mexique, 65 légionnaires sont chargés de protéger un convoi en direction de Puebla, ville assiégée par les Français. Ils sont attaqués près de Camerone par plus de 2000 mexicains. Faisant valoir la supériorité du nombre, un officier mexicain leur somme de se rendre, ce à quoi le capitaine Danjou qui commandait alors les légionnaires fait répondre : « Nous avons des cartouches et ne nous rendrons pas ! ». Il fait alors jurer à ses hommes de lutter jusqu'au bout. Les légionnaires résistent pendant 9 heures. 33 sont tués et 31 faits prisonniers. Presque tous sont blessés, et les deux tiers des blessés succomberont à leurs blessures au cours de leur captivité. Camerone n’aura pas d’incidence sur l’expédition du Mexique.

En 1845, à Sidi Brahim, dans la région d’Oran en Algérie, un petit détachement du corps expéditionnaire français rencontre plus de 5000 cavaliers de l’émir Abd el Kader. Le colonel Montagnac engage le combat sans se soucier du nombre de ses adversaires. La petite troupe est écrasée par les cavaliers arabes. Seuls 11 chasseurs en sortent vivants. Sidi Brahim restera en marge de l’histoire de la conquête et de l’occupation de l’Algérie.

Ce que l’on voudrait célébrer dans ces évènements, c'est le courage et l’abnégation des hommes. Mais l’armée exalte également l'esprit d’un sacrifice suprême inutile, faisant indirectement l’éloge d’un commandement irresponsable. Le discours du général Dary, commandant de la légion étrangère, à l’occasion des cérémonies de Camerone en 2005 est exemplaire : « Faire Camerone aujourd’hui, c’est d’abord être conscient qu’il n’y a pas de petites missions, que toutes méritent un engagement personnel, qui peut aller jusqu’au sacrifice… Il s’agit bien pour nous aujourd’hui, en recevant la mission opérationnelle d’être conscients du devoir de la remplir, quoi qu’il puisse nous en coûter. »

Le projet de refonte du statut général des militaires de 2003 éliminait la référence à l’esprit de sacrifice. Mais celle-ci a été rétablie à la suite du mécontentement des associations d’anciens et des cadres de l’armée de terre (1), c'est à dire des catégories les moins exposées au combat.

vendredi 22 avril 2011

L’Afghanistan à Plus Belle la Vie

Vivien, un ex-militaire revenu d'Afghanistan débarque au Mistral. Malgré quelques craintes initiales sur son honnêteté (il sort de prison et fréquente un malfrat), ce soldat d’une beauté et d’un caractère rustiques s’avère être un gentil. Les producteurs de la série, toujours à la pointe de l’actualité, le font souffrir d’un trouble de stress post-traumatique (PTSD). Il s’ensuit une romance entre Vivien et la belle et richissime Céline Frémont.

Nous ne pouvons que remercier Plus Belle la Vie de présenter une image positive du soldat. En espérant que les scénaristes donnent une issue heureuse à sa vie.

dimanche 13 mars 2011

Plus de victimes civiles, principalement à cause des insurgés


En janvier dernier, l’ISAF a fourni à la revue Science (1) une base de données des victimes civiles en Afghanistan, appelée CIVCAV. On estime que 2537 civils ont été tués et 5594 ont été blessés au cours des 2 derniers années. 12% de ces victimes sont attribuées aux forces de l’ISAF et le reste aux insurgés (principalement par des explosions d’IED). Le nombre de morts est identique à 93% à celui trouvé chez Wikileaks.
La revue Science a comparé ces données avec celles fournies par les Nations Unies et par une organisation afghane de droits humanitaires. Il apparaît que les chiffres de l’ISAF sont deux fois inférieurs, mais les tendances sont très similaires.
Le nombre de civils tués en 2010 serait de 15% à 19% plus élevé qu'en 2009. Malgré le durcissement des opérations en 2010, le nombre de civils tués par l'ISAF aurait baissé de 26% et, pour les seules victimes de frappes aériennes de 10% à 50% selon les sources.
En résumé, les actions de l'ISAF semblent moins meurtrières pour les civils afghans, mais le bilan s'aggrave malgré tout en raison des actions des insurgés.
Toutes ces données peuvent être consultées à http://scim.ag/afghandata

(1) Science, 11 Mars 2011, Vol. 331 p. 1256-1260

dimanche 20 février 2011

Un soldat de 19 ans tué en Afghanistan


Un chasseur alpin du 7e BCA a été tué hier soir sur la route de Tagab à Nijrab, en Kapisa. Un convoi français qui rentrait à Nijrab après avoir effectué une opération de ravitaillement dans la vallée d’Alasay a été pris à partie par des insurgés. Le VAB où se trouvait le soldat a été touché par une arme anti-char. Deux autres occupants ont été blessés, dont un grièvement. Le soldat tué est le 1ère classe Clément Chamarier, âgé de 19 ans. Le journaliste Jean Guisnel rappelle que son jeune âge est une caractéristique commune à tous les EVAT (Engagé Volontaire de l'Armée de Terre), que l’armée recrute avec le slogan "Devenez vous-même".

dimanche 13 février 2011

L’évolution du nombre de soldats, civils et insurgés tués en Afghanistan à partir des données Wikileaks


Cliquer sur la figure pour agrandir.

Les fuites publiées par Wikileaks n’ont pas vraiment apporté de révélations sur le conflit en Afghanistan, du moins pour ceux qui suivaient la question attentivement. Toutefois, avec 79000 rapports, on peut faire des statistiques. Par exemple, la figure ci-dessus montre le nombre de personnes tuées par période de 6 mois dans les forces de l’ISAF, dans les forces afghanes (armée et police), chez les insurgés et dans la population civile tel qu’on peut les compter sur Wikileaks (1), ainsi que les chiffres donnés par le site indépendant « iCasualties », une référence reconnue sur la question. Si l’on compare les courbes d’iCasualties et de Wikileaks pour l’ISAF, on constate qu’elles sont pratiquement identiques. On peut donc supposer que les rapports de Wikileaks sont raisonnablement exhaustifs également sur les autres informations non disponibles publiquement.

Pourtant, Wikileaks est incomplet en ce qui concerne les victimes civiles. Alors que les chiffres officiels disponibles (2) indiquent 7092 morts pour la période 2006-2009, Wikileaks ne voit que 3285 civils tués à la même période. Ceci pourrait s’expliquer par le fait qu’une grande partie des victimes civiles (76%) est causée par les insurgés, et que ces cas ne sont pas tous rapportés à l’ISAF.

En ce qui concerne les insurgés, il n’existe pas de chiffres officiels. Des sources officieuses (3) annoncent environ 14.000 talibans tués entre 2005 et 2009, ce qui est du même ordre que ce que montre Wikileaks. Il y aurait donc 15 insurgés tués pour chaque soldat de l’ISAF tué. Toutefois ce nombre est à prendre avec précaution, puisque l’armée ne peut évaluer avec précision le nombre de tués dans le camp adverse.

Pour les forces afghanes, on peut voir que le nombre de morts sur l’ensemble de la période 2005-2009 est près de quatre fois plus élevé que celui de l’ISAF. L’effectif total de ces forces en 2009 étant de 178.000 hommes pour l’armée et la police afghane contre 113.000 pour l’ISAF, un soldat des forces afghanes aurait donc près de deux fois plus de chances d’être tué qu’un soldat de l’ISAF. A noter que le rapport officiel américain SIGAR (4) ne donnait que 1176 soldats et policiers afghans tués en 2007-2008, contre 1650 pour Wikileaks.

De façon générale, l'évolution des chiffres de mortalité tel qu’observé dans Wikileaks est cohérente avec ce que l’on connaît, c’est à dire un fort durcissement du conflit depuis la deuxième moitié de 2009. Les deux pics de mortalité des talibans fin 2006 et fin 2007 correspondent à l’opération Medusa et ses suites dans la région de Kandahar.

(1) Pour plus de détails sur les critères utilisés écrire à : giselle.sanchez.3@gmail.com
(2) Human Rights Watch : 929 morts en 2006 et 1.633 en 2007 et UNAMA (United Nations Assistance Mission in Afghanistan) : 2.118 morts en 2008 et 2.412 en 2009
(3) http://en.wikipedia.org/wiki/List_of_Taliban_fatality_reports_in_Afghanistan
(4) Special Inspector General for Afghanistan Reconstruction, Quarterly Report to the United States Congress, July

samedi 5 février 2011

Changement de doctrine : opération "kill or capture" de l'armée française

Selon le journaliste Luc Mathieu, correspondant de Libération à Kaboul, l’armée française mène depuis une semaine une opération dans le district de Tagab. La nouveauté est que cette opération est de type « kill or capture » (tuer ou capturer). Fin 2010, les américains annonçaient une évolution de la contre-insurrection et un retour aux anciennes méthodes : tuer et capturer les ennemis. Il semble donc que les français s’y mettent aussi.

Les officiers français tués en Afghanistan

Sur les 53 soldats français tués en Afghanistan depuis le début du conflit, cinq étaient officiers. Sur ces cinq officiers, quatre étaient d'anciens sous-officiers et un était un contractuel O.R.S.A. (officier de réserve en situation d’activité).

dimanche 23 janvier 2011

L’aumônier islamophobe

L'abbé Benoit Julien de Pommerol, aumônier catholique des légionnaires déployés en Surobi début 2010, dénonce dans un rapport de fin de mission (1) la "déférence" et la "bienveillance" envers l'Islam qui est exigée des militaires français servant en Afghanistan.

Sans le vouloir, l’aumônier illustre bien certains aspects naïfs de la contre-insurrection : une femme soldat devant porter le voile et les militaires se pliant au ramadan en présence des afghans. C'est bien sous-estimer l'intelligence des afghans de penser que ceux-ci attendent des soldats occidentaux une telle mise en scène.

D’autre part, l’abbé écrit à la fin de son rapport « Ce qui a construit notre pays sont les valeurs de la foi judéo-chrétienne. Ce qui construit le comportement des afghans est la haine de nos personnes et la violence contre nous… (cf. le coran, la charia, les hadiths, etc.) »
L’amalgame islamisme-islam n'est pas chose nouvelle mais, à notre connaissance, c’est la première fois depuis le début de cette guerre qu’un militaire français se prononce publiquement contre les afghans et les musulmans en général.

(1) Visible par exemple ici